Aux confins du visible, une fragile écriture de silence, arrimée aux secrets du monde, irradie sans fin l'étendue. Manuel Ruiz Vida montre peu. Dans sa maîtrise absolue de la distance, pour mieux saisir la totalité du visible, dit l'impérieuse nécessité du dépouillement pictural.
Chez lui, d'abord mental, l'espace oscille entre abstraction et figuration. Peinture-mystère, peinture-matière, somptueuse d'essentialité. Dans une absence d'échelle qui ose affronter le vide, microcosme et macrocosme s'indistinguent. Le dehors et le dedans fusionnent, et l'oeil s'abandonne aux insidieux miroirs de l'altérité. Dans cette peinture d'éveil, Manuel Ruiz Vida crée des tranches d'immensité, et se moque souverainement des séduisantes apparences pour mieux restituer les richesses infinies des textures du visible...
Au creux de cette ascèse créatrice, il ignore la provocation chromatique. L'opacité archaïque et diffuse convient parfaitement à son dépouillement pictural, et vidée de tout repère mondain, la plénitude s'étend sans limite. La peinture a toujours le dernier mot.
Contre la prolifération contagieuse du trop-plein matériel, l'artiste prend ses distances avec les excès de la modernité. Il invente ainsi des outils primordiaux, des récipients d'âme évidés. On dirait l'alphabet magique de toute entreprise humaine. Nés d'une lumière lointaine, pudique et ténue, ils portent la contemplation jusqu'au bord aigu de l'abîme.
Manuel Ruiz Vida immacule l'existence. Chez lui, l'union du vide et du calme pur sublime les affres du monde. L'essentiel est mis à nu dans un univers en apesanteur, où chaque peinture est un seuil. Aux marges de l'art occidental, l'oeuvre de Manuel Ruiz Vida ouvre la voie mystique de la peinture, et s'oxygène d'absence. Absence nue, avide, et qui devient féconde en effa?ant ce qui se désigne aveuglément dans toutes les illusions du monde.
Les lointains du cosmos et les poussières du présent aimantent sans fin ses peintures. « Peindre, c'est ouvrir l'espace » dit-il.
Christian Noorbergen
EN ATTENDANT INFO :
Un petit mot pour ceux qui perdent parfois courage, ou que la vie a bousculé si fort qu'ils ont, au fond de leur âme, la vague peur de ne pas pouvoir continuer.
Nous jouons "la délicatesse", au Théâtre de l'Œuvre à Paris, jusque fin avril. C'est un beau succès.
C'est l'histoire d'une femme qui a perdu celui qu'elle aimait et qui peu à peu va se reconstruire...
Alors je pense à vous, les douleurs dormantes, les griffés de la vie.
La nature nous apprend à vivre, nous donnant des exemples de courage, sans nous donner aucune leçon de morale, juste parce qu'elle est...
Il y a ainsi dans ce joli monde bien fait, des plantes phœnix... Ou pyrophytes.
Ces fleurs, ou plutôt ces bougeons, ne peuvent se développer en temps normal. Ce ne sont que des potentiels timides qui peuvent ne jamais éclore.
Mais si un incendie vient détruire tout un univers, elles se libèrent enfin. Elles naissent du chaos, de la destruction ; dans le chaos et la destruction.
Alors, missionnaires de cette nature ravagée, elles croissent et fleurissent comme un espoir.
Et lentement, elles attirent les insectes, qui rependent leurs pollens et développent , à nouveau, la vie...
Puis, une fois la nature reconstituée, elles disparaissent humblement, comme une ressource de vie qui s'endort, attendant sans l'espérer, le drame éventuel.
Alors à vous, dont le cœur est brûlé, sachez qu'au fond de vous, il y a une fleur phœnix, pour vous aider à faire refleurir votre vie, l'espoir... cet abandon au monde, cette confiance en la vie...
Nourrissez cette fleur invisible, en acceptant juste l'idée qu'elle existe simplement.
On vous souhaite de belles fêtes de renaissance de la nature, sans oublier que notre Dieu du théâtre est le même que celui des moissons...
Un spectacle vit, meurt... Et renaît. Surtout si vous venez nourrir ce bourgeon de vos applaudissements et autres sourires.
Le monde est bien fait.
Bons spectacles Phœnix !