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Date : 01-02-2024 12:51:21
60millions conso!Sans réelle surprise, nous avons retrouvé des résidus de pesticides dans quinze produits, soit plus du tiers de notre panel. Au total, neuf substances différentes ont été détectées. Bonne nouvelle : aucune ne dépasse la limite réglementaire… quand elle existe. En effet, la Commission européenne fixe un seuil à ne pas dépasser, la « limite maximale de résidus » (LMR), exprimée en mg de résidu par kg d’aliment. Ce seuil est calculé pour chaque substance phytosanitaire et en fonction de la culture concernée (fruit, légume ou céréale).
Le riz basmati non bio, le plus contaminé
Or, parmi les molécules recherchées dans cet essai, le butoxyde de pipéronyle n’a pas de LMR du fait de sa fonction de « synergisant » et non de pesticide. Il sert à doper l’efficacité d’un composé actif et, donc, d’en limiter l’usage. Aucune étude n’a, jusqu’ici, démontré de risque réel à son usage… mais celui-ci est croissant. En témoigne sa présence dans treize références de notre sélection.
Les riz basmati, excepté les bio, sont les plus contaminés. Un constat qui n’étonne pas Delphine Marie-Vivien, chercheuse au Cirad : « Pour l’Inde, principal pays producteur avec le Pakistan, le riz basmati représente un produit très rémunérateur. Il y a quinze ans, les producteurs ont ajouté des variétés plus productives et poussé vers une riziculture plus intensive et utilisatrice de pesticides. »
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Des molécules considérées à risque dans certains riz
En queue de classement, quatre références pèchent par le nombre de résidus retrouvés (deux ou trois) et, surtout, par la nocivité potentielle de ces molécules. Deux d’entre elles sont considérées à risque pour la santé humaine : le tébuconazole, un fongicide et régulateur de croissance des plantes, et la cyperméthrine, un puissant insecticide qui, sur le riz, sert à lutter contre les insectes piquant la tige et suçant la sève.
Le problème ? L’Agence de sécurité sanitaire française (Anses) et l’Agence européenne des produits chimiques (Echa) les ont classés l’un et l’autre « potentiellement cancérogènes, mutagènes et toxiques pour la reproduction » ou CMR. Nous avons retrouvé du tébuconazole dans trois produits et de la cyperméthrine dans deux références.
L’étrange statut de l’isoprothiolane
Ce n’est pas tout. Un autre pesticide, l’isoprothiolane, identifié dans trois produits, relève d’une étrange réglementation : interdit d’usage dans l’Union européenne, mais dont les résidus sont autorisés dans les produits alimentaires. Autrement dit, on protège les agriculteurs et la végétation de notre continent, mais pas ceux des autres zones du globe, où ces substances continuent d’être utilisées…
Autre famille épinglée sur les pesticides, quatre riz long grain sur neuf présentent des résidus. Carton rouge pour le riz d’une marque de distributeur ! Il compte quatre molécules différentes dont deux présentent des risques pour l’humain et l’environnement (quinclorac et cyperméthrine). Ce lot, analysé par notre laboratoire, provient du Myanmar.
Difficile, toutefois, d’attribuer la contamination à un pays plutôt qu’à un autre, d’autant que l’enseigne nous a précisé que ce riz, selon les lots, pouvait provenir de huit pays différents (européens, asiatiques ou d’Amérique du Sud). Dommage que la mention de l’origine soit facultative sur les produits bruts préemballés. Pour la traçabilité, on repassera !
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Seulement deux références sans pesticides
À l’inverse, satisfecit pour les riz de Camargue et les riz thaï, indemnes, ou presque, de contamination chimique. Seul l’arsenic inorganique, naturellement présent dans les sols, pose problème pour la santé humaine ; pour cela, il ne doit pas dépasser une valeur seuil de 0,15 mg/kg pour les riz usinés (blancs) et non étuvés, et de 0,25 mg/kg pour les riz étuvés (incollables) et décortiqués, comme le riz semi-complet.
D’après un rapport publié en 2021 par l’Autorité européenne de sécurité des aliments (Efsa), le riz figure parmi les principaux aliments vecteurs de ce métal lourd, devant les autres céréales et l’eau potable. Tout simplement parce que cette plante absorbe l’arsenic du sol et de l’eau d’irrigation parfois fortement polluée à cause du manque de moyens de traitement.
Résultat : la quasi-totalité de nos échantillons en contiennent, à l’exception de trois riz basmati. Cette famille s’en sort d’ailleurs très bien sur ce critère, les valeurs étant largement en deçà de la limite réglementaire.
On ne peut pas en dire autant des riz thaï, affichant en moyenne deux fois plus d’arsenic que les basmati : huit références sur dix oscillent entre 0,10 mg et 0,13 mg/kg, sans toutefois dépasser le seuil critique. Difficile d’expliquer cette différence, mises à part la qualité des eaux de la région et la variété du riz.
Mais ce sont surtout les riz de Camargue, et plus encore les riz long grain qui s’avèrent – relativement – chargés en arsenic. Si toutes les teneurs restent dans les clous, nous avons attribué un mauvais point à un riz long grain incollable d’une marque de distributeur, flirtant avec la non-conformité.
Des aflatoxines et des rappels de produits
Autre catégorie de substances problématiques, les aflatoxines ont été recherchées et quantifiées dans nos quarante références. Il s’agit de toxines produites par des moisissures, en particulier dans les régions chaudes et humides, par exemple si le stockage des grains est fait dans de mauvaises conditions. Elles sont reconnues cancérigènes et génotoxiques (capables d’induire des anomalies congénitales chez les enfants). D’où, comme pour l’arsenic et certains pesticides, des valeurs réglementaires extrêmement strictes. Leur dépassement entraîne systématiquement le rappel des lots concernés.
À noter que le riz fait régulièrement l’objet de rappels, le plus souvent à cause de substances toxiques interdites ou dépassant la valeur seuil, de la présence de germes pathogènes ou, plus rarement, d’insectes. C’est ce qui s’est passé il y a quelques mois pour un lot du riz basmati Carrefour extra, sachant que le lot incriminé ne correspond pas à celui de nos tests. Rien de cela dans notre panel.
Bien qu’un quart des produits contiennent des traces d’aflatoxines, principalement dans les riz basmati, on a affaire à de très faibles quantités, de l’ordre de quelques pourcents de la limite réglementaire. Il n’y a donc aucun risque pour la santé
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