
Quelle place occupe le sexe dans la Science-Fiction ? Voyage au centre de la chair, entre puritanisme et perversion.
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« De tous les genres littéraires, le western seul peut rivaliser de pudeur avec la science-fiction ». Voilà comment l’écrivain britannique Kingsley Amis soldait, dans un essai intitulé L’Univers de la Science-Fiction (1960), la question de la place du sexe dans les littératures de l’imaginaire. Jusqu’aux années 60, la SF traîne la réputation d’un genre puritain et d’une littérature masculine portant des œillères, pour qui l’exploration du futur n’a rien à voir avec la conquête de nouveaux plaisirs, la réécriture des désirs ou la déconstruction du corps. |
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Les pionniers du XIXème siècle, Jules Vernes et H.G Wells, n’en avaient que faire, préférant l’aventure épique aux frontières du réel ; les maîtres de l’âge d’or, Arthur C. Clarke et Isaac Asimov étaient eux, trop obsédés par le contrôle de la technologie, la survie de l’espèce et l’avènement d’un nouveau contrat social. Ce n’est qu’à partir du Summer of Love et de la révolution sexuelle que la science-fiction prend pleinement conscience du rôle central de la sexualité dans la définition d’une nouvelle humanité. Et comme toujours avec ce genre littéraire de sales gosses qui ne jurent que par la provocation, le sujet est devenu brûlant. A travers quelques romans de science-fiction d’hier et d’aujourd’hui, entre carcans et émancipation, entre pur plaisir et reproduction, entre nouvelles technologies et nouvelles perversions, voyage au centre de la chair.
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Le sexe est politique mais sera-t-il technologique ? Comment la course à l’innovation va-t-elle modifier notre rapport au plaisir et au corps ? La question s’impose plus que jamais à l’heure du transhumanisme et de l’intelligence artificielle. Si l’œuvre de J.G Ballard est souvent qualifiée, à raison, de trash, déviante, amorale, elle est surtout un formidable réflexion d’avant-garde à ce sujet. Avec Crash ! (1973), adapté au cinéma par Cronenberg, le romancier britannique est le premier à aborder frontalement la question du lien entre sexe et machine. Il raconte les agissements d’une communauté obsédée par la tôle froissée, qui aime reconstituer des accidents de voiture célèbres et va même jusqu'à en provoquer pour assouvir ses pulsions morbides. J.G Ballard nous plonge en immersion dans les mécanismes d’un fétichisme qui veut unir le corps humain et l’acier.
Une perversion sexuelle en passe de devenir une norme à une époque qui fantasme un homme mécanique, augmenté. Autre œuvre dérangeante qui convoque le présent, La Semence du Démon (1973) de Dean Koontz, imagine une femme réduite à l’état d’esclave sexuelle par l’intelligence artificielle qui contrôle sa maison. Forme robotique libidineuse, Proteus soumet Susan à ses moindres désirs et effleure la perversion humaine.
Deux œuvres d’une modernité folle, datant des années 70 et puis plus rien. À part 2069, l’hilarant recueil de nouvelles de Josselin Bordat, mêlant science-fiction et érotisme (au programme positions sexuelles futuristes et hacking de string connecté) La SF actuelle semble plus occupée par la portée politique du sexe que par l’acte de chair en lui-même et la fabrication de nouveaux désirs permis par la technologie. Une nouvelle forme de puritanisme. À quand la révolution sexuelle ?

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